Nataliia Bohatyrova et sa fille Zlata ont trouvé refuge à Yvonand, où un logement leur a été mis à disposition depuis une dizaine de jours. Une aide à laquelle elles ne s’attendaient pas.
C’est peut-être le destin qui a poussé Nataliia Bohatyrova et Ilyna Hufschmid à se rencontrer. Zlata, la fille de la première, allait à l’école avec la fille de la seconde. Comme cela arrive parfois, l’amitié entre les deux écolières a débouché sur une relation similaire entre les deux mamans. Un vrai lien s’est créé, même si, il y a quelques années, Ilyna et sa fille ont quitté l’Ukraine pour la Suisse.
Une amitié qui va prendre un tournant particulier à partir des terribles événements du 24 février dernier. Comme pratiquement toutes les autres régions d’Ukraine, celle de la ville de Mykolaïv, où se trouvent Nataliia et Zlata, n’échappe pas aux bombardements. La situation devient insoutenable et, le 11 ou le 12 mars, la mère s’enfuit avec sa fille. Les souvenirs ne sont pas toujours précis, tout est encore si frais pour elles, le choc si vivant. «Il y avait des bombardements, je n’ai pensé qu’à sauver ma fille, sans penser à ce que le lendemain nous réserverait, lance la femme, laissant échapper quelques larmes. J’ai laissé mon mari en Ukraine, il est toujours au pays.»
Les deux femmes fuient l’horreur de la guerre, mais découvrent la galère des réfugiés. Après cinq jours de train, des nuits dans des wagons et d’autres dans des centres, Nataliia et sa fille n’arrivent pas à trouver refuge. Jusqu’à l’appel d’Ilyna Hufschmid, qui propose à son amie de venir en Suisse.
Le 17 août, elles arrivent à Yverdon, puis le 18 août, les Ukrainiennes sont mises en relation avec Laura Marques, de l’association Yverdon-Soumy (lire encadré), qui leur propose un studio mis à disposition par la Commune d’Yvonand. «Nous avons eu une chance immense de rencontrer Laura, tient à préciser Nataliia Bohatyrova. Les gens nous aident beaucoup, je ne m’y attendais pas du tout.»
Depuis, la mère et sa fille découvrent un nouveau pays, une nouvelle culture: «J’aime beaucoup la Suisse, s’enthousiasme la femme originaire du sud de l’Ukraine. Ici, il y a tout pour la population! Par contre, c’est un peu cher…»
Si les deux femmes se sentent désormais en sécurité, la situation demeure très difficile pour elles. «Je regarde très souvent les nouvelles, parce que ma mère et ma belle-mère sont toujours sur place, en plus de mon mari. Mais aujourd’hui, je savais qu’il y aurait des bombardements, donc j’essaie de ne pas trop regarder.»
Et pas facile de penser à autre chose lorsque l’on n’a pas d’emploi et qu’on ne maîtrise pas la langue de son pays d’accueil. «J’étais coiffeuse, mais je travaillais aussi à la ferme en Ukraine. Je voudrais faire quelque chose ici, n’importe quel travail plutôt que de rester à la maison sans rien faire.» Heureusement, le petit Lev (prononcer Liéf, lion en russe), fidèle compagnon de Nataliia et Zlata, a aussi fait le déplacement en Suisse et offre un peu de réconfort.
Malgré l’incertitude, Nataliia Bohatyrova pense-t-elle déjà à la suite? «Notre avenir dépend évidemment de la durée de cette guerre. Moi je vais de toute façon rentrer auprès de mon mari, explique la mère de famille. Mais, selon la date à laquelle je repartirai, peut-être que Zlata terminera ses études ici, qui sait. En Ukraine, même si la guerre s’arrête, les bombardements ont largement détruit les infrastructures existantes. Les universités aussi ont été touchées et ça prendra du temps de tout reconstruire. En restant ici, ma fille ne prendrait pas de retard.»
Mais avant de rejoindre les bancs de l’université, en Suisse, en Ukraine ou ailleurs, Zlata peut déjà profiter des enseignements d’une école yverdonnoise. Où elle se rend avec la fille d’Ilyna Hufschmid, qui l’aide à interagir avec les autres élèves. Après avoir été camarades à 7 ans dans le sud de l’Ukraine, les voilà à nouveau réunies dans une salle de classe. A 15 ans et en Suisse.
Une dizaine de logements déjà trouvés
La solidarité est grande avec le peuple ukrainien dans le Nord vaudois. Nombreux sont ceux à avoir ouvert leurs portes, mis à disposition un logement pour une famille, souvent femme et enfants.
Mais accueillir plusieurs réfugiés dans un logement qu’on possède ne se fait pas comme ça: des mesures administratives sont obligatoires, une assurance doit être souscrite… Parmi ceux qui se battent pour faciliter cet accueil, on trouve l’association Solidarité Yverdon-Soumy, qui tire son nom de la ville de Soumy, justement, d’où est originaire une habitante de la région, qui a lancé le groupe. «Notre but est d’entreprendre des démarches envers des propriétaires, mais aussi auprès des communes, explique Laura Marques, membre de l’association. Le bail est établi au nom de l’association et dure entre six mois et une année. Nous cherchons aussi des bénévoles pour faire découvrir les points essentiels de la vie de tous les jours à Yvonand aux réfugiés, ou pour les soutenir dans les démarches administratives.»
Pour plus d’informations:
www.yverdon-soumy.ch