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L’art ganté

25 avril 2025 | Textes: Lucas Panchaud
Edition N°3932

Fruit de la réflexion et de la collaboration de trois portiers chevronnés, dont Kennedy Rodrigues, l’académie Success Keeper a vu le jour en 2024. Une école pensée par les gardiens pour les gardiens.

«Mon père ne voulait pas que je joue dans les buts, j’ai donc été forcé de débuter joueur de champ, à contrecœur», se rappelle Kennedy Rodrigues en évoquant ses premiers pas balle au pied. «Je me souviens m’être souvent demandé pourquoi personne ne voulait être gardien lorsqu’on jouait avec les copains. Déjà petit, je trouvais ce poste fascinant et, surtout, j’avais une obsession pour les maillots, que je trouvais magnifiques. Un jour, mon oncle m’a offert une paire de gants de gardien, j’étais allé me cacher pour les essayer. J’étais aux anges.»

Son souhait de pouvoir évoluer entre les poteaux est devenu réalité durant sa formation à Yverdon Sport:«Mon entraîneur, Michel Barras, était excédé par mon comportement. J’étais très caractériel et je prenais beaucoup de cartons. Il m’a dit qu’au prochain écart de conduite, ma punition serait de jouer le match suivant dans les buts. Il n’a pas eu besoin de me le dire deux fois.»

D’aventures en aventures

Depuis ce jour, le parcours du dernier rempart nord-vaudois a connu une trajectoire ascendante, avant de prendre plusieurs tournants, le premier, à l’adolescence: « Je traversais une période très compliquée sur le plan personnel puisque je venais de perdre mon père. Mon coach à ce moment, Benoît Pythoud, m’a pris sous son aile et m’a incité à ne pas prendre le mauvais chemin, ce qu’avec mon tempérament, j’aurais totalement été susceptible de faire. »

D’expérience en expérience, d’YS à Baulmes en passant par Malley et Forward-Morges, l’Yverdonnois s’est fait un nom. Une réputation solide qui, alors qu’il venait de fêter ses 22 ans, lui a ouvert les portes de Stade-Lausanne-Ouchy, qui militait à cette époque en 1re ligue, sous les ordres d’Andrea Binotto. «J’étais au top de ma forme et mon travail avec Éric Rapo, qui était en charge des gardiens, me permettait d’exploiter au mieux mes qualités.»

De quoi le mener aux points culminants de sa carrière : l’élimination du FC Sion en Coupe de Suisse en 2017, suivie de l’accession avec les Stadistes à la Promotion League dans la foulée. Stoppé net par une grave blessure au genou, le Lusitanien d’origine a changé de perspective sur le football et sur la vie en général. «Je suis passé d’un rythme où je m’entraînais quotidiennement en sortant du travail, sans compter les innombrables déplacements les week-ends. Cette pause forcée m’a permis de passer plus de temps avec mes proches et de reconsidérer mes priorités», reconnaît le père de famille.

L’envie de transmettre son savoir-faire

Sa convalescence l’a aussi amené à considérer sérieusement l’idée de passer de l’autre côté de la ligne de touche et de se lancer dans le coaching. Même s’il a, depuis,  refoulé la pelouse, principalement dans les ligues inférieures. «Pour moi, être gardien de but, c’est un art, on peut évidemment progresser sur les aspects techniques, mais je suis convaincu qu’on doit avoir ça quelque part en nous. J’ai toujours été attiré par le fait de transmettre mon savoir et mon expérience. Peu importe le niveau des gardiens dont je m’occupe, la notion de plaisir reste au centre de mes entraînements.» Jusqu’à entraîner son fils, Diego, un jour ? «J’ai reproduit un peu le même schéma qu’avec mon père, je ne voulais pas qu’il soit gardien quand il a commencé le foot, confie «Ken». Puis j’ai vu qu’il aimait tellement cela et qu’il avait ce petit quelque chose. Je me vois un peu en lui en quelque sorte. Encore aujourd’hui, il me dit souvent : regarde, papa, les maillots des gardiens sont vraiment trop stylés!»