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Le magasin de confection Espace Mode ferme

24 avril 2025 | i. ro
Edition N°La Région Hebdo No 8

Le commerce emblématique de la rue du Lac a habillé de nombreux habitants de la région durant plus de cinquante ans.

«Liquidation, fermeture définitive». En passant devant les vitrines d’Espace Mode, au beau milieu de la rue du Lac, plus d’un Yverdonnois est surpris. Car ce magasin de confection faisait partie du paysage commercial du centre-ville depuis des décennies. Mais la pandémie du Covid puis la récente fermeture de Manor ont provoqué une forte baisse du chiffre d’affaires. Afin d’éviter d’entrer dans une spirale d’agonie, la famille Marendaz a décidé de tirer la prise.

Rencontrés hier matin, Daniel Marendaz et son fils Patrick sont certes résignés, mais le moment de tristesse vécu lors de la décision est déjà derrière eux. Car mettre fin à une activité de longue date n’a pas été une décision facile à prendre, d’autant plus que Patrick n’est pas encore en âge de prendre la retraite. Mais cette décision s’imposait.

«Jusqu’à la pandémie du Covid, la situation était normale. Certes, on souffrait de la concurrence du commerce en ligne, mais notre clientèle traditionnelle nous était très fidèle. Avec le Covid, le phénomène s’est considérablement accéléré, au point de menacer la viabilité de l’affaire», expliquent père et fils.

Le coup de grâce

Et Patrick d’ajouter: «L’an dernier a été déficitaire. On a vécu sur nos réserves. Mais la fermeture de Manor a encore fait chuter le chiffre d’affaires. La clientèle de ce grand magasin était aussi en partie la nôtre. Dans ce contexte, et la perspective d’un chantier qui va durer plusieurs années, il était logique qu’on se pose la question: va-t-on encore continuer?»

«Même si elle a été difficile à prendre, la décision s’est imposée logiquement: l’évolution du commerce, la multiplication des mesures compliquant l’accès au centre-ville et le fait de nous sentir abandonnés par les autorités nous ont fait opter pour la fermeture.»

Conditions défavorables

A l’instar d’un accident, qui est toujours le résultat d’un concours de circonstances, la fermeture d’Espace Mode et d’autres commerces a pour origine diverses causes.

Il n’empêche qu’au moment où les citoyens yverdonnois s’apprêtent à voter sur l’initiative pour un parking souterrain à la place d’Armes, Patrick Marendaz estime que plutôt que des promesses sans suite, la Municipalité pourrait prendre des mesures toutes simples. Lesquelles? «Par exemple offrir la gratuité pour la première heure de stationnement. Il est arrivé plus d’une fois que nos clients s’en plaignent. D’autant plus qu’en oubliant l’horodateur, ils se retrouvent avec une amende sur le pare-brise. Ce n’est pas comme cela qu’on encourage les gens à venir en ville.»

Dans une situation déjà compliquée par les nouvelles orientations commerciales et les habitudes d’achat qui évoluent, des petits détails comme le stationnement comptent. «Je connais bien Zurich pour y avoir vécu et travaillé durant deux ans. Lors d’un déplacement pour des achats avec mon père, nous avons visité un quartier qui n’était qu’un terrain vague. Aujourd’hui, 14 000 personnes y vivent. Vous avez des jardins et des terrasses fleuries. Mais sous les immeubles, il y a des parkings souterrains», ajoute Patrick Marendaz.

Et de relever que plusieurs villes offrent la première heure de stationnement, et pratiquent ensuite un tarif qui reste abordable. Il cite en exemple Morges et Nyon, qui ont à la fois des parkings souterrains et en surface: le vaste parking du Parc des sports, le parking souterrain  du centre-ville et le parking couvert de l’Ilot Sud pour Morges; la place Perdtemps, et les parkings souterrains de La Combe, de la Duche, notamment, pour Nyon.

La Ville de Nyon, qui vient de présenter un projet de parking souterrain à Perdtemps, dispose aujourd’hui de quelque 4200 places de stationnement, dont 3140 au centre-ville (chiffres ressortant du site officiel de la Ville)! «Vous pensez qu’on va attirer des gens à haut revenu si on n’offre pas certaines conditions minimales?» interroge Patrick Marendaz.

Espace Mode va non seulement fermer ses portes, mais la famille Marendaz a également mis l’immeuble en vente. Et pourtant, il y a moins de dix ans, un investissement important avait été réalisé dans la rénovation de la toiture. «On l’avait fait parce qu’on croyait à l’avenir», relève Daniel Marendaz qui, à 85 ans, pourra s’accorder une retraite bien méritée. On ne le verra plus faire les cent pas dans la rue du Lac: «Je restais dehors pour attirer les clients», lance-t-il avec un grand sourire. Quant à son fils Patrick, âgé de 54 ans, il n’est pas encore fixé sur sa reconversion.