Nord vaudois – La section vaudoise de Patrimoine Suisse souhaite déposer une pétition pour sauvegarder les vingt cures vaudoises mises en vente par l’Etat de Vaud. Cette pétition devrait être prochainement soumise au Grand Conseil. Sept cures nord vaudoises sont concernées.
Bâties entre le seizième et le dix-huitième siècle, suite à la Réformation du Pays de Vaud, les cures qui ne remplissent plus des besoins paroissiaux pourront être acquises par des privés. Pour rappel, en juillet 2015, la décision du conseiller d’Etat Pascal Broulis de mettre en vente vingt cures sur les 156 réparties sur tout le territoire vaudois avait suscité l’émoi parmi la population.
Lancée en juin 2016, une pétition, qui a récolté plus de 800 signatures à ce jour, devrait être soumises prochainement au Grand Conseil. «Nous nous sommes réunis en assemblée générale, jeudi dernier, et avons décidé de poursuivre la récolte des signatures jusqu’aux prochaines élections cantonales, affirme Denis de Techtermann, président de la section vaudoise de Patrimoine Suisse.
Selon Monique Fontannaz, qui a publié un ouvrage à ce sujet, les cures vaudoises assuraient «la subsistance matérielle des pasteurs de l’Eglise réformée». Bien qu’ils ne soient pas porteurs d’une «signification propre», ces édifices servaient de «cadre de vie à ceux qui avaient pour mission de manifester, à travers les gestes les plus quotidiens, la grâce divine. […] La cure, avec ses fenêtres, sa porte, son jardin, ses habitants était une réalité plus simple, plus quotidienne et accessible que l’église».
«Un devoir culturel de l’Etat»
«Notre conseiller d’Etat semble oublier sa mission de conservateur du patrimoine et se limite à tenir des propos purement économiques, domaine dans lequel il excelle, déclare, navré, Denis de Techtermann. Or ses compétences font qu’aujourd’hui les finances cantonales n’ont pas besoin de ces quelques millions.»
La plupart des cures sont notées 3 ou 4 au recensement architectural. «Ces notes sont trop faibles, puisqu’elles permettraient même la démolition de certaines cures pour être remplacées par des immeubles. C’est un devoir culturel de l’Etat de maintenir ce patrimoine », poursuit le président, qui craint une perte de contrôle quant à la qualité de conservation de ces édifices. Et de comparer le démantèlement des cures à un jeu d’échec : «Si vous enlevez un pion, c’est l’échiquier dans son ensemble qui perd de sa valeur».
Sept cures mises en vente
Dans le Jura-Nord vaudois, sept cures sont proposées à la vente. Il s’agit de celles de Rances, Donneloye, Combremont-le-Grand, Champvent, L’Abbaye, Denezy et Suchy. La plupart d’entre elles sont louées à des particuliers, faute de la présence d’un ministre paroissial. «C’est une triste réalité, mais il n’y a plus assez de pasteurs pour loger dans toutes les cures, constate Anne-Christine Rapin, diacre de la paroisse de Champvent-Montagny, qui habite dans la cure du second village. Personnellement, je préfère voir une cure habitée qu’une cure vide, mais dans quelle mesure l’Etat peut-il continuer à subventionner de tels logements ?», s’interroge- t-elle. Quant à Alain Ledoux, pasteur de la paroisse de Pomy- Gressy-Suchy qui vit actuellement dans la cure de Gressy, ce dernier affirme que «dès le moment où il n’y a pas de progression du nombre de pasteurs dans la région, je ne vois pas l’intérêt de les laisser inoccupées».
Sources : Monique Fontannaz, Les Cures vaudoises, Histoire architecturale 1536-1845, N°84, Bibliothèque historique vaudoise.
Les communes restent prioritaires
Concernant la vente des vingt cures, «aucun calendrier n’a été fixé pour le moment», précise Pascal Broulis, conseiller d’Etat en charge du dossier, qui aimerait accorder la vente de ces édifices en priorité aux communes, aux associations régionales, telles que paroisses ou associations à but non lucratif, dans l’objectif d’animer et de préserver ces lieux.
A ce jour, quelques communes ont émis le souhait d’acheter certaines cures, mais «il est encore prématuré d’en discuter, puisque le processus est long». Pour rappel, il avait fallu compter environ cinq ans pour mettre en vente les 19 cures précédentes. Si les communes n’expriment aucun intérêt public, elles suivront une vente plus large», poursuit le conseiller d’Etat.